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Appel à contributions | Les Cahiers d’EMAM « Récupération, réparation et réemploi des rebuts dans les villes des mondes arabes et méditerranéens. Pratiques, circulations et mobilisations » — LIMITE : 01/04/2024

Les Cahiers d’EMAM sont une revue interdisciplinaire qui se propose de contribuer à la restitution des savoirs sur le Monde arabe et la Méditerranée, dans leurs interférences avec le reste du monde, autour des questions urbaines et des processus de constructions/ reconfigurations territoriales dans leurs dimensions sociales, économiques et politiques en encourageant les idées nouvelles et les démarches comparatives.

https://journals.openedition.org/emam

Référencements de la revue : https://journals.openedition.org/emam/3633

En l’absence d’actualisation du classement des revues par l’HCERS depuis 2013 et en dépit de nos demandes réitérées de classement, restées sans accusé de réception, la revue a adopté depuis 2012 une procédure d’évaluation par les pairs, en double aveugle, garantie de qualité et de sérieux. Le comité de rédaction de la revue peut fournir une attestation de sa politique d’évaluation pour qui de droit.

Coordinatrices du numéro

Emmanuelle Durand (chercheuse postdoctorale en anthropologie, IRIS-EHESS, LEST Aix-Marseille Université)
Katharina Grüneisl (chercheuse post-doctorale en géographie, University of Nottingham)
Bénédicte Florin (maîtresse de conférences en géographie, Université de Tours, CITERES-EMAM)

Appel à proposition d’articles

La politisation des « crises des déchets » dans différentes villes arabes – du Caire (2003) à Beyrouth (2015), en passant par Sfax (2021) et Tripoli (2022) – souligne combien la mauvaise gestion des ordures combinée à l’importation (il)licite de matières détritiques sont devenues des symboles éminents de corruption et de défaillance des États et de leurs institutions (Abu-Rish, 2015 ; Bouhlel, Furniss, 2023). Ces moments de troubles socio-politiques (délégations de service brutales et imposées, grèves de la collecte, mobilisations des récupérateurs, etc.) rendent temporairement visibles les déchets et les matériaux de rebut ainsi que les diverses économies de récupération, de réparation et de réemploi dont ils forment la matière première.

Les objets, matières et matériaux auxquels propose de s’intéresser ce numéro oscillent, au fil de leur « vie sociale » (Appadurai, 1986), entre divers statuts : surplus, produits toxiques, ressources ou encore marchandises. C’est pourquoi – tout en nous inscrivant dans le champ des discard studies attachées à l’analyse des systèmes socioculturels, normatifs et économiques qui forgent les relations aux matériaux détritiques (voir discardstudies.com) – nous privilégions le terme de rebut à celui de déchet (juridiquement trop réducteur) afin d’appréhender nos objets dans une acception large, de façon à étendre cet appel à contributions à une diversité de matières et matériaux.

Dans les villes des mondes arabes et méditerranéens, l’analyse des politiques publiques de gestion des déchets (Chbat, 2010 ; Fahmi, Sutton, 2010 ; Debout, 2012 ; Safar Zitoun, 2015 ; Salman, 2021 ; Farah, Verdeil, 2021) s’est enrichie d’une littérature scientifique mettant en lumière d’autres manières de faire avec ces matières, qui s’invitent et s’inventent, historiquement et majoritairement dans les périphéries urbaines, même si apparaissent ces dernières décennies des dépôts ou points de collecte, plus ou moins officiels, dans les centres-villes. De nombreux travaux de recherche – en anthropologie et en géographie notamment – analysent les formes de (re)valorisation des déchets en ressources dans les contextes urbains arabes. Ces derniers révèlent en quoi les pratiques et usages des ordures ménagères (Allix, Florin, 2016 ; Azaitraoui et al., 2018 ; Florin, 2015a ; Furniss, 2017 ; Giannotta, 2022 ; Salah Fahmi, 2011), du textile et de la fripe, des objets usagés (El Maarouf, 2018 ; Stamatopoulou-Robbins, 2019 ; Grüneisl, 2020 ; Durand, 2022), de la ferraille (Gotts, 2020 ; Saleh, Zakar, 2018), des déchets électroniques (Davis, Garb, 2019) ou encore des véhicules de deuxième main (Tastevin, 2014) assurent les moyens d’existence de différentes communautés souvent marginalisées au sein desquelles agissent des acteurs informels, mais aussi formels.

Cette nouvelle livraison des Cahiers d’EMAM se propose de rassembler et de mettre en discussion des recherches qui, partant d’analyses empiriques de pratiques de récupération, de réparation et de réemploi de matériaux mis au rebut, interrogent les divers processus de (re)mise en valeur du déchet et éclairent les modes de structuration de ces différentes économies ainsi que les mondes du travail, les réseaux d’acteurs et les espaces urbains qui les façonnent. En faisant dialoguer différentes matérialités détritiques (organique, plastique, métallique, textile, etc.), ce Cahier entend ainsi faire des économies de rebuts un point d’entrée pour une analyse fine, et renouvelée, des (re)configurations du travail, des pratiques socio-culturelles, des transformations spatiales ainsi que des subjectivités politiques à l’œuvre. En ouvrant une perspective originale sur la « région », ces contributions visent à donner de la visibilité à cette littérature portant sur les mondes arabes, et plus largement méditerranéens, qui demeure un point aveugle des études sur les déchets – hormis le cas du Caire, contexte urbain ayant fait l’objet de nombreux travaux (Desvaux, Du Roy, 2019).

S’inscrivant dans une approche multi-scalaire et une démarche résolument transdisciplinaire, cet appel à contributions invite donc des chercheur·es et doctorant·es d’horizons géographiques et disciplinaires variés à interroger le rôle et la place des économies de rebuts dans les mondes arabes et du pourtour méditerranéen. Ces contributions pourront s’inscrire dans l’un des trois axes proposés ci-dessous ou de façon transversale.

1. Mondes du travail

De plus en plus lucratif, le secteur des matériaux de rebut attire de nouveaux acteurs, attisant ainsi convoitises et concurrences au sein d’économies qui se développent dans les failles du capitalisme et en reproduisent certaines de ses logiques (Tsing, 2015). L’intensification des activités liées aux matières détritiques entraîne une spécialisation croissante de certaines filières qui laissent apparaître de nouveaux savoir-faire (techniques et commerciaux) et métiers, lesquels reposent sur – ou fabriquent – des hiérarchies socio-professionnelles complexes. Au-delà des acteurs de « l’informel » dont les pratiques sont aujourd’hui relativement bien documentées, comment se reconfigurent les filières et se structurent des activités proto-industrielles, parfois (très) sophistiquées ? Dans quelle mesure la professionnalisation de ces économies populaires a-t-elle des incidences sur les relations avec les autres acteurs économiques et politiques ? Les évolutions observées, à partir de terrains et études de cas très différenciés, permettent-elles de réinterroger la relation informel-formel et « l’inclusion perverse » (Sawaia, 2001) d’une main-d’œuvre à bas coût, longtemps considérée comme marginalisée, mais dont la place évolue soit vers des formes d’intégration à l’instar des coopératives marocaines (Florin, 2015b), soit vers davantage d’exclusion, provoquant parfois des résistances et mobilisations.

2. Circulations de matières et vies urbaines

Cet axe met en avant l’analyse des cultures et filières matérielles ainsi que « la vie sociale des objets » et des étapes de leur transmutation en ressources. Ce faisant, cet axe s’intéressera aux circulations et micro-économies générées par ces processus d’extraction et de (re)création de la valeur, en les reliant aux mondes sociaux qui les prennent en charge. L’émergence, ou le renforcement, de nouvelles pratiques de récupération, de réparation et de réemploi offre des secondes vies aux objets et surplus de sociétés de consommation qui, elles aussi, évoluent vers des formes de pénuries dans certains exemples – comme le Liban –, ou au contraire, ailleurs, vers davantage de consommation pour les classes moyennes et aisées. Comment et dans quelle mesure ces nouvelles économies s’insèrent-elles dans l’espace urbain et le transforment-elles ? Enfin, comment ces économies urbaines sont-elles liées à d’autres espaces, notamment à des mondes ruraux, mais aussi par exemple à des routes logistiques ou à des espaces portuaires ? Cet axe pourra intégrer les outils de l’ethnographie multi-sites ou de la géographie des circulations à l’échelle des quartiers, des villes ou d’espaces plus vastes interurbains, régionaux et transnationaux.

3. Les rebuts comme objets politiques

En envisageant les rebuts comme troubles à l’ordre socio-moral (Douglas, 1966), ce troisième axe invite à interroger leur portée contestatrice. Au-delà des formes de subsistance qu’ils permettent, les rebuts peuvent aussi jouer un rôle dans la construction de subjectivités politiques émergentes. Ici pourront être analysés les initiatives et discours d’acteurs mobilisant la matière détritique en tant que levier de revendications, ainsi que le positionnement politique auquel s’arriment ces expériences et leurs circulations éventuelles. À cet égard, l’externalisation massive des rebuts des Nords vers les Suds suscite des interrogations sur les inégalités sociales et environnementales de la part des acteurs qui ont à faire avec ces matières, aussi vitales que toxiques. En ce sens, les travaux qui développeraient une approche sensible au vivant – en vue d’éclairer la portée politique des risques ou des faits de contamination des corps et des écosystèmes par les différents produits de rebut –, seront bienvenus. Cet axe suggère, ainsi, d’explorer les récits militants, les pratiques innovantes et les revendications citoyennes de revalorisation (matérielle, économique, symbolique et morale) des rebuts, afin de les resituer dans le registre d’une écologie pragmatique, politique et populaire.

Calendrier de l’appel

  • 1er avril 2024 : Envoi de la note d’intention (3 000 signes environ) avec mots-clés, titre provisoire et courte biographie, accompagnée de : nom, prénom, institution d’appartenance, fonction, discipline principale.

  • 15 mai 2024 : Information concernant l’acceptation (ou le refus).

  • 1er juillet 2024 : Envoi des articles définitifs, en tenant compte des éventuelles remarques des coordinatrices.
    Pour information : 30 à 50 000 signes, le moins de mise en page possible, hormis les titres et sous-titres qui apparaîtront clairement. Iconographie bienvenue, intégrée au texte et fournie parallèlement dans des fichiers séparés. Voir autres consignes à l’adresse https://journals.openedition.org/emam/414

  • 15 octobre 2024 : Retour des évaluations en double aveugle.

  • 15 décembre 2024 : Retour des textes dans leur version finale.

  • Début 2025 : Mise en ligne du numéro.

Envoi des propositions et éventuelles questions, conjointement, à :

À retrouver sur le site des Cahiers d’EMAM


OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Chargé de diffusion scientifique (13 mars 2024). Appel à contributions | Les Cahiers d’EMAM « Récupération, réparation et réemploi des rebuts dans les villes des mondes arabes et méditerranéens. Pratiques, circulations et mobilisations » — LIMITE : 01/04/2024. IISMM. Consulté le 15 mai 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/w0k5


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